Ingo HEINEMANN

ALLEMAGNE

Ingo HEINEMANN

– Juriste, Directeur de A.G.P.F.

Une loi contractuelle pour réglementer le psycho marché,
garantie de protection des consommateurs contre les non médecins

La confédération d’associations allemande A.G.P.F.e.V a étudié de très près de 1978 à 1984 les questions de santé pouvant découler du problème sectaire.
A savoir :

  • les méthodes d’exercice d’influence
  • les modes de vie qui en résultent
  • les conséquences qui en découlent pour la santé.

A cette époque en Allemagne, d’importants congrès ont été organisés à ce sujet et quelques livres ont été publiés (1).

En conséquence, nous avons exigé en 1984 la création d’une législation afférente.
Nous avons d’abord pensé à une interdiction de l’exercice d’influence abusif. Mais ce projet s’est révélé trop difficile à concrétiser. Il nous est alors apparu clairement que cet exercice d’influence servait aussi à la vente de biens et de services. Il était apparu que la quasi-totalité des sectes avaient une activité de vente.
C’est la raison pour laquelle Ursula Caberta (2) a élaboré la proposition de loi contractuelle.
Actuellement, une loi de ce type passe pour la deuxième fois en discussion (3) au Bundestag allemand.

A l’échelle européenne, il faudrait essayer de créer une telle loi contractuelle et l’interdiction de l’exercice d’influence abusif.

On suppose que 90 % des sectes proposent un traitement curatif sous une forme ou une autre. Dans la plupart des cas, aucun médecin n’y travaille. Ces sectes exercent donc l’activité de guérisseur. Cela est aussi le cas lorsqu’elles ne possèdent pas l’autorisation qui est requise dans la plupart des pays pour exercer un traitement curatif. Par « traitement curatif », on n’entend pas l’exercice de la prière en vue de faire recouvrir la santé. On n’entend pas non plus par là l’exercice de la prière en vue d’obtenir une guérison dans un cas particulier. On entend par là au contraire des actes concrets et la promesse que ces actes aboutiront à une guérison.
Lorsque l’on attend ou que l’on exige un paiement pour ces actes, donc lorsqu’il est question d’argent, on conclut aussi un contrat. C’est de ce type de contrat dont il est question ici.

En Allemagne, la Cour constitutionnelle fédérale a statué il y a seulement quelques semaines que les guérisseurs spirituels n’ont pas besoin d’autorisation pour exercer en tant que guérisseurs (4). Le nombre des guérisseurs spirituels va donc considérablement augmenter. La guérison spirituelle se voit ainsi définitivement classée comme activité professionnelle, au même titre que toute autre activité.

Sur le marché du psychisme, on propose aussi la plupart du temps, en plus, de l’aide pour tous les problèmes de la vie. C’est pourquoi il s’agit ici, d’une manière tout à fait générale, de conseil et soutien psychosocial moyennant paiement. Je ne parle donc pas ici d’une théorie.

Une telle loi est actuellement en cours de discussion au Bundestag allemand. Elle est intitulée « Lebensbewältigungshilfegesetz » [loi en matière d’aide à la guérison et à l’épanouissement individuel] [federal act governing contracts in the field of commercial life-counselling services].

Je l’ai appelée « Psycho Vertrags Gesetz » [loi contractuelle pour le psycho marché] [Psycho Contract Law].
L’A.G.P.Fe.v exige une telle loi depuis 1984. Une proposition de loi a déjà été une fois mise en discussion devant le Bundestag en 1998. Cette année-là, il n’a pas été possible de la traiter avant la fin de la législature. J’espère donc que cette fois la loi en question pourra être votée. J’espère aussi qu’elle sera un jour ou l’autre reprise au niveau européen. Cette loi ne doit pas décider de la question de savoir si la croyance, les placebos, les informations, la confiance ou des rituels peuvent aider ou présenter une efficacité. Cette loi ne doit pas non plus décider de la question de savoir si une méthode est sensée ou insensée.
Cette loi dit seulement : lorsque l’on vend des placebos, des informations, de la confiance ou des rituels, le contrat doit avoir un contenu minimum défini pour que le consommateur soit protégé. En outre, cette loi ne doit pas s’appliquer au traitement médical normal.

La FECRIS et ses organisations membres s’occupent en premier lieu des sectes et des cultes.
Parmi les missions de ces organismes, on relève :

  • l’aide aux personnes concernées
  • l’information du public
  • la prévention, donc l’empêchement de futures anomalies.

La prévention a entre autres pour mission de vérifier la nécessité de l’amendement ou de la création de lois.
Il ne s’agit pas d’un jeu intellectuel pour juristes. Il s’agit de faire aboutir des revendications. Car qui n’exige rien de la politique n’en obtient rien non plus. Mais cela signifie aussi qu’il faut convaincre les politiciens de l’existence d’un problème concret qu’il faut régler. Quant aux revendications adressées aux politiciens, il faut qu’elles puissent être satisfaites. Les lois panacées permettant de tout résoudre, ce n’est pas réaliste. Car les lois ne s’appliquent jamais qu’à des états de fait et des domaines juridiques précis.
C’est pourquoi il y a tout lieu de supposer qu’il n’y aura jamais non plus de loi générale relative aux sectes.

La question est donc de savoir quels états de fait on peut réglementer. Les questions de croyance ne peuvent être réglées par des lois. On ne peut empêcher personne de croire à l’efficacité du procédé que la Scientologie propose sous l’appellation « auditing ». Il y a des centaines de procédés similaires proposés par des centaines de prestataires.

En revanche, les questions d’argent doivent être réglées par des lois. Quand quelqu’un vend quelque chose, c’est à lui que s’appliquent les lois s’appliquant à la vente. Lorsque l’on verse de l’argent en contrepartie de biens ou de services, il y a toujours un contrat à la base. Ce qui importe, ce n’est pas de savoir si celui-ci a été conclu par écrit. Un contrat peut tout aussi bien être conclu oralement ou par des actes, comme par exemple une remise d’argent.

Lorsque des particuliers achètent des biens ou des services, on les désigne sous le nom de consommateurs. Les consommateurs n’ont pas de service juridique.
C’est pourquoi les consommateurs ont besoin de bénéficier d’une protection : protection contre les escrocs, contre des produits nocifs ou dangereux, contre une publicité mensongère ou trompeuse et contre les services juridiques des vendeurs. C’est la raison pour laquelle il existe une protection des consommateurs et des lois pour la protection des consommateurs.

La Communauté européenne a fait de la protection des consommateurs un important principe de protection. C’est pourquoi, à la faveur de la transposition du droit européen, la notion de consommateur a été introduite en 2002 dans le code civil allemand (deutsches Bürgerliches Gesetzbuch, BGB).
Il en est de même dans la totalité des pays de la Communauté européenne.

Lorsque survient un litige entre un fournisseur et un consommateur, entre un vendeur et un acheteur, la première question qui se pose est toujours de savoir quel contenu a le contrat.
Cela dépend de :

  • la convention écrite ou orale et
  • en plus, des lois en vigueur.

En vertu de ces lois, un contrat est souvent totalement ou partiellement nul. Alors c’est la loi qui s‘applique. Mais quelle loi ?
La réponse à la question de savoir quelles lois s’appliquent alors dans un cas particulier sera fonction de l’objet du contrat.

Un voyage [de vacances] est régi par d’autres lois que l’achat d’une voiture. Cet objet du contrat est souvent difficile à déterminer. Cette difficulté s’est par exemple posée pour les voyages [de vacances]. Un voyage comprend le transport du vacancier, mais il comprend aussi la chambre et le repas de midi. Et comme le consommateur ne dispose pas d’un service juridique, il a souvent été victime de tromperies. C’est la raison pour laquelle on a introduit en Europe le droit contractuel des voyages.

Le cas des offres présentées sur le psycho marché est tout à fait similaire. Il faut tout d’abord identifier ce qui a été vendu.

Il n’y a pas d’usage uniforme en termes d’appellations. Au contraire, d’ailleurs : chaque offreur invente de nouveaux concepts et prétend que son offre est totalement nouvelle et unique. C’est pourquoi il est également difficile d’identifier quels droits et quelles obligations ont les parties contractantes. Comment faut-il déterminer si le contrat est exécuté ou non ? Il en résulte une incertitude juridique et un défaut d’équité [ou de justice]. Une lacune en matière d’équité [ou de justice].

Les tribunaux ne savent pas quel droit ils doivent appliquer. Les avocats ne sont pas en mesure d’évaluer leurs chances de succès dans un procès. C’est pourquoi dans ce domaine la Justice s’apparente actuellement à un véritable jeu de dés. Lorsque la prestation promise n’a pas été effectuée et que le consommateur va devant les tribunaux, personne ne peut actuellement prédire exactement l’issue d’un tel procès. C’est la raison pour laquelle il n’y a que peu de jugements en ce domaine, même à l’échelle internationale.

Un exemple :

Je choisis comme exemple la Scientologie, parce qu’elle fait figure de leader mondial sur le psycho marché. La Scientologie ne vend pas seulement une croyance dans les OVNI, mais aussi et surtout de prétendues méthodes de guérison contre les maladies psychologiques et somatiques. La Scientologie mène un combat contre la psychiatrie et entend se constituer elle-même un monopole dans le domaine du traitement des troubles psychiques.

Une heure d’ »auditing » coûte chez la Scientologie tantôt 1 200 euros de l’heure, tantôt plus, tantôt moins (5). Certes on ne vend pas « une heure d’auditing ». Ce que l’on vend, c’est seulement « 1 intensif ». Ce qui représente 12,5 heures. En outre, il y a manifestement différentes versions du produit appelé « auditing ». Toutefois la description de ces différentes versions avec les prix correspondants ne figure absolument nulle part. Et le client ne reçoit aucun contrat où tout cela serait décrit avec précision. Il ne reçoit rien de plus qu’une quittance comportant le mot « auditing », le nombre des « intensifs » et des abréviations qui sont parfaitement incompréhensibles. Le client débourse donc 15 000 euros sans recevoir la moindre description d’aucune sorte de ce qu’il est en droit d’exiger pour ce prix.
Ces 15 000 euros, il doit bien entendu les payer d’avance, et cela intégralement. C’est la particularité du psycho marché (6) : le produit est tout simplement invisible.

La protection du consommateur (7) sur le psycho marché revêt une importance particulière parce que :

  • les produits ne peuvent pas être mesurés, pesés ni testés,
  • les descriptions des produits sont souvent insuffisantes et ambiguës,
  • les prix sont souvent totalement disproportionnés par rapport aux prestations fournies,
  • les produits peuvent être dangereux pour la santé et engendrer des dépendances,
  • la publicité enfreint fréquemment le droit de la publicité
  • les droits de l’homme dont jouissent les clients peuvent être lésés.

Même sur le psycho marché on a recours à des « Conditions générales de vente« . Ce sont des règles censées s’appliquer à tous les contrats. Elles se révèlent la plupart du temps si compliquées que le service juridique du consommateur a lui-même besoin pour cela d’avoir son propre service juridique. C’est pourquoi la plupart des pays ont des lois propres qui précisent lesquelles de ces conditions sont effectives ou pas. Même la Scientologie a de telles « Conditions générales de vente » (8) : les brûlantes « informations, définitions et règles concernant les étudiants et les Preclears ». On les présente un jour ou l’autre au client pour signature. La plupart du temps, le client n’en reçoit pas la moindre copie. Impossible non plus de les trouver sur l’offre Internet de la Scientologie, et encore moins à la mention « Conditions générales de vente ».

Mais lorsque quelqu’un veut récupérer son argent, ces « règles » réapparaissent comme par enchantement. Elles sont alors produites devant les tribunaux. On peut alors y lire : lorsque l’auditing n’a pas fonctionné, le client doit s’efforcer de s’améliorer ultérieurement. Il doit donc acheter un nouvel auditing. Les délais sont réduits de façon draconienne : le client ne peut exiger un remboursement que 90 jours après la fin.
Voilà pour ce qui concerne l’exemple de la Scientologie.

En Allemagne, il y a très certainement quelques centaines de sectes et autres organismes à proposer du conseil et soutien psychosocial moyennant paiements. Viennent s’y ajouter probablement des milliers de particuliers qui proposent eux aussi des offres. Ils vendent tous également des cours.

Il y est presque toujours question d’exercice d’influence et d’auto influence.
Par exemple, on peut apprendre la maîtrise de soi. Ou bien la course sur des charbons ardents.
On y prétend qu’on peut apprendre à influencer son corps en passant, que les pieds ne sont pas brûlés. On sait certes depuis des décennies que personne ne se brûle les pieds en courant sur les braises s’il ne s’arrête pas (9). Le temps de contact est trop court pour cela. Et pourtant ces programmes continuent à se vendre comme par le passé. Il faut tout de même remarquer : la course sur les charbons ardents, personne n’en a vraiment besoin. Le produit, ce n’est donc pas la course sur les braises, mais un programme grâce auquel on peut prétendument apprendre la maîtrise de son propre corps.

Actuellement, il est pratiquement impossible pour un client de récupérer son argent. Et cela vaut pour tous les pays. La raison en est qu’il s’agit en général d’un objet de contrat atypique. Ou bien alors on se contente de s’abriter derrière un objet de contrat – exemple : la course sur des charbons ardents – alors qu’en réalité il est question de tout autre chose, à savoir une prétendue maîtrise de son propre corps.

Une telle loi contractuelle pourrait être aussi conçue pour l’Europe.

Elle pourrait aussi inclure la publicité. Sur le psycho marché, on peut constater la pratique de formes tout à fait extrêmes de publicité.
On peut citer l’exemple du conditionnement émotionnel. Le professeur d’université allemand Kroeber-Riel (10) a étudié la publicité dans les années 70 à l’aide de sa « caméra à oeil », et il a découvert qu’il existe une publicité contre laquelle il est à peine possible de se défendre, à savoir la publicité qui fait appel à des « dispositions innées » de l’être humain. Il les qualifiées d’ »armes dangereuses » et a exigé que l’on amende les lois : « l’objectif consistant à empêcher le conditionnement ne pourra être atteint qu’à travers une protection des consommateurs qui mette un terme à ce conditionnement. »
Kroeber-Riel n’a pas étudié de sectes, seulement la publicité.
On ne dispose jusqu’à maintenant d’aucun concept généralement usité pour de telles formes de publicité.

C’est pourquoi actuellement, tout comme à cette époque, on désigne familièrement une telle publicité par l’expression lavage de cerveau.
On soupçonne ce genre de publicité de déclencher une incitation à l’achat automatique. On utilise également ce genre de publicité en rapport direct avec le diagnostic et le traitement.
La Scientologie par exemple utilise un test de personnalité qui est présenté et utilisé dans des cas particuliers comme instrument de diagnostic. Dans des cas individuels, il peut en résulter un diagnostic de risque aigu de suicide. On y joint le conseil pressant de suivre un certain cours, et donc la plupart du temps d’acheter de l’ »auditing ».
Il est possible d’intégrer cette forme de publicité dans une réglementation législative.
A titre de rappel : en Europe, la publicité pour les cigarettes est déjà strictement limitée. Il y a encore 20 ans, personne n’aurait imaginé qu’une telle chose soit seulement possible.

Le résultat d’une telle loi sera que :

  • Tout contrat doit être conclu par écrit.
  • Le coût et la contrepartie promise doivent y être mentionnés avec précision.
  • Le consommateur dispose d’un droit de rétractation.

Tout cela existe depuis déjà bien longtemps dans de nombreux domaines. Finalement, une telle loi a été conçue lorsque la vente sur Internet est devenue populaire. En l’espace de quelques années seulement il y a eu des lois de ce type dans toute l’Europe.

Un jour nous obtiendrons une telle loi contractuelle pour le psycho marché pour l’Europe. Tout simplement parce qu’il y a ici une lacune dans la protection des consommateurs. Mais il faudrait que nous fassions un pas de plus :

Nous devrions exiger que :

En cas de recours au conditionnement émotionnel, le contrat soit sans effet. Il n’est donc pas question par exemple d’interdire le lavage de cerveau. Cela concernerait également des zones frontières indéfinissables.
Ce serait impossible à imposer. Mais en revanche, il y aurait inefficience du contrat relevant du psycho marché en cas de recours au conditionnement émotionnel.

Que pouvons-nous faire aujourd’hui ?

Nous pouvons dire à nos députés : Nous voulons une loi contractuelle européenne réglementant le psycho marché.

Marseille, 27-28 mars 2004

Notes:

(1) Karbe et Müller-Küppers : Destruktive Kulte. Gesellschaftliche und gesundheitliche Folgen totalitärer pseudoreligiöser Bewegungen [Sectes destructrices. Les effets des mouvements pseudo religieux totalitaires sur la société et la santé]. Verlag für Med. Psychologie Göttingen 1983, ISBN 3-525-45227-6
www.AGPF.de/Karbe81.htm
Müller-Küppers, Manfred / Specht, Friedrich: « Neue Jugendreligionen » [Les nouvelles religions pour la jeunesse]. Verlag Vandenhoeck & Ruprecht, Göttingen 1979. En annexe : Auszüge aus der Dokumentation über die Auswirkung der Jugendreligionen auf Jugendliche in Einzelfällen [Extraits de la documentation sur l’impact des religions pour la jeunesse sur des jeunes, à la lumière de cas particuliers], AGPF 1978, env. 50 pages, ISBN 3-525-45224-1

(2) Ursula Caberta dirige le groupe de travail gouvernemental sur la Scientologie du Land de Hambourg.
Celui-ci est dénommé « Oberste Landesjugendbehörde für den jugendschutz bezüglich neuer religiöser und ideologischer Gemeinschaften und Psychogruppen » [Haute Autorité du Land pour la Jeunesse, chargée de la protection de la jeunesse contre les nouvelles communautés religieuses et idéologiques et les groupes psycho-influents], www.Arbeitsgruppe-Scientology.de

(3) www.AGPF.de/Psychogesetz.htm, www.AGPF.de/PsychoVertragsGesetz-Bayern2003.htm

(4) Bundesverfassungsgericht [Cour constitutionnelle fédérale] 1 BvR 784/03, arrêt du 2 mars 2004

(5) Tarifs : voir www.Ingo-Heinemann.de/Preise2000.htm

(6) www.AGPF.de/psychomarkt.htm , description en anglais : The Enquete Commission of the Bundestag about the psycho market :

(7) www.AGPF.de/Verbraucherschutz.htm

(8) http://www.Ingo-Heinemann.de/Vertragsbedingungen2002.htm

(9) www.AGPF.de/akt87-2.htm#FEUER

(10) Prof. Dr. Kroeber-Riel : Konsumentenverhalten [Le comportement des consommateurs]. 2e édition 1980. Kroeber-Riel appelle (sans référence à la Scientologie ou à des sectes) une telle publicité « conditionnement émotionnel« .
Selon le Prof. Dr. Kroeber-Riel, il est à peine possible de s’y dérober, même lorsque l’on sait de quoi il s’agit. Et une éducation à ce sujet présente une efficacité tout au plus partielle :
De tels stimuli, qui déclenchent des comportements solidement ancrés, produisent des effets de la façon la plus sure. En font surtout partie, comme nous l’a enseigné la recherche éthologique, les stimuli qui font appel aux « dispositions innées » de l’être humain et deviennent ainsi des armes dangereuses une fois entre les mains de publicitaires …
« En dernier lieu, il faut citer quelques implications pour la politique de défense des consommateurs.
Le comportement conditionné est, comme cela a déjà été expliqué, un « comportement guidé par des stimuli ». Même une attitude négative et une position de défense vis-à-vis de la publicité ne nuisent absolument pas à la réussite du conditionnement. On est même en droit de supposer que le consommateur, même lorsqu’il essaie intentionnellement, n’est pas capable de se dérober à un tel conditionnement. D’où les conclusions tirées en matière de politique de défense des consommateurs : si l’on veut empêcher le conditionnement du consommateur, par exemple parce qu’on établit des liens émotionnels avec des produits nocifs, cela ne sert à rien d’éduquer le consommateur et de faire appel à sa raison. L’objectif consistant à empêcher le conditionnement ne peut être atteint que par une protection des consommateurs qui mette un terme au conditionnement. C’est ici qu’apparaissent les lacunes d’une politique de défense des consommateurs qui est excessivement attachée au modèle normatif du consommateur raisonnable, et oriente surtout ses mesures vers l’information et l’éducation des consommateurs (KROEBER-RIEL, 1977b). … L’objection parfois émise, selon laquelle un conditionnement du consommateur ne peut jamais conduire à le faire acheter des produits qu’il n’a en aucun cas envie de consommer, passe à côté du fond du problème.
Bien évidemment ce n’est pas possible, et bien évidemment le conditionnement n’est possible que dans le cadre d’une « diversité de réaction manipulable » (voir à ce sujet les p. 590 et s.). Mais déjà en lui-même le conditionnement à l’intérieur des marges de manœuvre restantes nous confronte aux problèmes considérables que pose le comportement humain ». (p. 146)
Voir www.ingo-heinemann.de/kroeber.htm